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Ballet en 2 actes et 4 tableaux
Première : le 9 février 1955 à l’Opéra de Paris
Musique : Marcel Delannoy
Argument (ou livret) : Serge Lifar
Décors : Roger Chastel
Costumes : André Levasseur
Direction musicale : Robert Blot
Principaux interprètes : Josette Amiel, Colette Even, Jacqueline Rayet (les Bohémiennes), Claude Bessy (l’Océanide), Peter Van Dijk (le Capitaine), Nina Vyroubova (la Fiancée)
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« Les Noces Fantastiques de Serge Lifar, sur une partition de Marcel Delannoy, dont la première eut lieu à l’Opéra le 9 février 1955, se présentent comme une œuvre dramatique, d’un genre nouveau. Chaque fois qu’on revoit ce ballet, on y découvre des traits inaperçus. Ainsi en est-il d’un tableau de maître qu’on regarde toujours comme si on le voyait pour la première fois. Les années terribles ont dû marquer profondément l’art de Lifar. Ce ballet était déjà prêt en 1943 grâce à la collaboration étroite de Serge Lifar et de Marcel Delannoy.
Le thème s’apparente à celui de Nautéos par certains éléments : naufrage, rencontre avec la souveraine des eaux, retour au village, amour et union avec la jeune fille. Mais ce qui est lumineux, et respire la joie de vivre dans Nautéos, tourne au drame dans Les Noces Fantastiques. La Néréide, conciliante de Nautéos, est menaçante dans Les Noces. Elle aussi rend sa proie, mais c’est un mort qu’elle renvoie à la surface, et c’est un revenant déchiqueté par les vagues qui vient danser dans son village natal, faisant trembler les paysans épouvantés. La fidélité de l’amour s’affirme non dans une vie pleine d’espoir, mais dans la mort, la danse nuptiale étant exécutée non sur la prairie verdoyante de Nautéos, mais au fond de la mer, devant une épave, par des marins noyés. Le chant joyeux se mue en une plainte angoissée, et le ballet se termine non par une danse générale, mais dans la solitude d’une côte déserte où un mort parle à Dieu.
La chorégraphie des Noces Fantastiques témoigne une fois de plus des inépuisables dons d’invention de Serge Lifar : dans le cadre des cinq positions fondamentales et des deux supplémentaires, les mouvements de l’adagio sont constamment élargis, assouplis par le recours à de nouvelles formes classiques. Toujours expressives, elles incarnent les sentiments les plus complexes, les plus raffinés. L’émotion qui émane de ce drame ne peut manquer de bouleverser le spectateur.
Aussi, le rideau tombé, après un moment de silence éclatait chaque fois une tempête d’applaudissements témoignant de l’émotion profonde des spectateurs.
Avec la collaboration des peintres André Levasseur pour les costumes, Roger Chastel pour les décors, Lifar réussit à créer un monde mystérieux, silencieux et menaçant. On ne saurait oublier ces chevaux marins aux longs museaux inclinés, aux petits pas sautillants, qui se tenaient immobiles au fond et, dociles au moindre geste de l’Océanide, trottaient en avant avec des hochements de tête, pour se placer des deux côtés du prisonnier. Ils paraissaient sortir d’un rêve inquiétant. Les deux requins géants, aux yeux brillants dans la pénombre, semblaient attendre le moment de saisir leur proie. Les poissons aux jupes imitant des écailles, faisaient la ronde et se déplaçaient en pas glissants, avec un petit mouvement du haut du corps. Toute scintillante dans son maillot bleu brodé, Claude Bessy, Océanide superbe, aux bras souples, au corps onduleux, flottant comme un poisson, apparaissait portée par ses sujets.
Ce ballet est une des plus belles œuvres du nouveau classicisme. Secondé par la virtuosité et l’ardeur du trio Vyroubova-Bessy-Van Dijk, par la fantaisie heureuse des peintres, et soutenu par la musique de Marcel Delannoy, qui répond admirablement aux mouvements des danseurs, le génie créateur de Serge Lifar réalisa l’idéal même de la danse : interprétation des passions et des idées dans les pures formes chorégraphiques. »
Serge Lifar rénovateur du ballet français par Jean Laurent et Julie Sazonova, Buchet/Chastel Corrêa, Paris, 1960 (pp. 189-191, 195)