Joan de Zarissa

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Ballet en 4 tableaux

Première : le 10 juillet 1942 à l’Opéra de Paris

Musique : Werner Egk

Argument (ou livret) : Werner Egk

Décors et costumes : Yves Brayer

Direction musicale : Werner Egk

Principaux interprètes : Micheline Bardin, Paulette Dynalix (les Servantes), Yvette Chauviré (Florence), Lycette Darsonval (Isabeau), Pierre Duprez (le Duc de fer), Nicolas Efimoff (le Monstre), Guylaine (le Fou), Marianne Ivanoff (Pérette), Serge Lifar(Joan), Milliand  et Martial Sauvageot (2 rois captifs), Serge Peretti (un jeune Chevalier), Roger Ritz (le Chevalier géant), Solange Schwarz (la plus Belle)

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Séducteur cruel et dénué de scrupules, Joan de Zarissa commence par séduire la belle Isabeau dont il tue le mari, puis la douce Florence qu’il gagne lors d’une partie de dés. Humiliée, Florence se suicide.

Mais nul crime ne restant impuni, Joan est hanté par les spectres de ses victimes et il meurt vaincu par les remords.

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« L’argument et la musique de ce ballet ont été écrits par l’excellent compositeur allemand Werner Egk, lequel s’est inspiré d’une légende bourguignonne pour une musique très solide, très saine, fort expressive, nettement rythmée et d’un rythme favorable aux développements chorégraphiques ; en outre, sa richesse mélodique et orchestrale accentue l’émotion de la danse. Joan de Zarissa est une sorte de Don Juan gothique, une figure intensément tragique, expressionniste. […]

[…] La chorégraphie de Joan de Zarissa était très stylisée. Certains de ses éléments évoquaient Durer, d’autres Jean Fouquet, et ce procédé lui faisait éviter tout naturalisme. Lors du duel de Joan avec le Chevalier de Fer, les deux adversaires se battaient avec des armes imaginaires, purement plastiques, comme le geste de soulever un glaive lourd. Un autre procédé chorégraphique de ce ballet, c’est l’utilisation de contrastes plastiques, opposant danses académiques et danses de caractère exécutées simultanément (un peu comme une première ébauche du « pas de six » de Fourberies), ou bien faisant exécuter un pas de deux très doux et très chantant sur le fond d’une bagarre. »

Serge Lifar, Le livre de la danse, Les Editions du Journal Musical Français, Paris, 1954, (pp. 177-178)

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Un ballet nouveau entre ce soir au répertoire de l’Opéra

Ce que j’ai voulu évoquer dans « Joan de Zarissa » par Serge Lifar

Un ballet nouveau doit entrer ce soir au répertoire de notre Opéra, Joan de Zarissa, de M. Werner Egk.

C’est une nouvelle version allemande, originale et puissamment dramatique, de l’éternelle légende de Don Juan. L’intérêt ne réside pas dans son schéma général, qui se rapproche de Da Ponte, de Molière et de Pouchkine, mais dans les détails, le climat médiéval et les nuances psychologiques que j’ai été chargé de traduire par la danse.

Ce que j’ai voulu évoquer surtout, à travers la chorégraphie de Joan de Zarissa, c’est le constructivisme puissant de l’Allemagne d’aujourd’hui, et l’évocation de cette force collective a fait que de tous mes derniers ballets Joan de Zarissa est le moins saltatif : l’élévation et les pointes de la danseuse n’y apparaissent que par instant, à titre de contraste surtout.

Dans ce sens, Joan de Zarissa s’oppose au Chevalier et la Damoiselle ; celui-ci est également un drame du moyen âge, mais il met en valeur, lui, toutes les ressources de l’élévation. Cela provient peut-être de la différence des sources premières de ces deux ballets : le Chevalier met en scène le moyen âge des tournois et des grandes épopées, tandis que Joan de Zarissa dévoile son côté sombre et maléfique, à travers les danses plus directement expressives.

J’ai déjà dit tout le bien que je pensais de la partition de M. Werner Egk et des décors et des costumes de M. Yves Brayer, l’un des plus forts parmi nos jeunes peintres, invité à l’Opéra par M. Jacques Rouché.

J’y ajouterai seulement que la réalisation du ballet a nécessité un très gros effort des services de notre Académie nationale. En plus du corps de ballet, il y a 80 choristes qui jouent, chantent et servent de décor vivant aux évolutions de tous nos premiers rôles, fraternellement unis dans un même désir de perfection.

Etoiles et premiers danseurs, grands sujets et coryphées, tous ont mis le meilleur d’eux-mêmes au service de cette œuvre en qui je veux voir les prémices d’une collaboration artistique, affective et féconde, entre deux grands pays voisins, représentants d’une culture multiséculaire.

Serge Lifar, Le Matin, 10 juillet 1942, page 1