Boléro

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Ballet en 1 acte

Première : le 31 décembre 1941 à l’Opéra de Paris

Musique : Maurice Ravel

Argument (ou livret) : Serge Lifar et Léon Leyritz

Décors et costumes : Léon Leyritz

Direction musicale : Louis Fourestier

Principaux interprètes : Serge Lifar (le Torero), Suzanne Lorcia (Marilèna), Serge Peretti (Spontano)

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« Boléro, d’après la musique de Maurice Ravel, avait été un des spectacles les plus réussis des Ballets d’Ida Rubinstein. Dans un décor sombre de taverne espagnole, la gitane (Ida Rubinstein) se mouvait sur la table, autour de laquelle étaient assis des convives dont on ne distinguait que les têtes très expressives.

Lifar, le réglant à la fin 1941, modifia le scénario qu’il rapprocha de celui de Carmen, mais en lui conférant une signification toute différente.

Sur une place publique, lieu de fêtes et de concours, un toréador livrait un combat à un taureau imaginaire. Séduite par son jeu, une belle Espagnole (Suzanne Lorcia) exprimait son amour dans un pas de deux, basé sur des mouvements folkloriques. Puis, entraînée par un autre admirateur spontané (Serge Peretti), elle partait laissant le torero désolé. Il jouait alors une autre corrida, où il ratait son coup et s’affaissait comme s’il avait été réellement frappé à mort par le taureau, tandis que la foule ne lui prêtait aucune attention. Tout se passait comme dans un rêve, d’abord heureux, puis tragique.

L’existence glorieuse et terrible du vrai toréador est difficile à représenter sur scène, car le défi à la Mort y tient la place principale. La tauromachie n’est pas seulement un art, c’est un véritable combat, dont l’enjeu chaque fois est la vie. Avant d’entrer dans l’arène, le torero va à la chapelle et s’agenouille devant la madone, implorant sa protection.

Les toréadors de la nouvelle école se jouent du danger en tournant le dos au taureau, en se mettant sur le genou, ou en exécutant quelque autre mouvement audacieux qui soulève souvent l’indignation des fervents de la tauromachie classique et sobre. Le matador, dernier descendant des jeux du cirque antique, n’existe dans toute sa pureté qu’en Espagne. N’ayant d’autre arme que son épée, son audace et son intelligence, il affronte la bête qui représente pour lui la Mort, et fête sa victoire ou tombe sans remords. Ce personnage, si simple et si extraordinaire, a toujours hanté l’imagination des dramaturges, des librettistes, des cinéastes, mais les feux de la rampe lui enlèvent sa raison d’être : la rencontre avec la mort réelle, et le transforment en un fat, un prétentieux, un séducteur de femmes, acclamé par la foule, tel que nous le présente l’opéra de Bizet.

Guidé par son intuition artistique, Lifar sentit le danger de cette confrontation, et il trouva la solution du problème. Son torero n’affectait jamais de l’être réellement : c’était un poète, un amoureux qui mimait des combats tantôt triomphants, tantôt mortels, uniquement en imagination, et qui mourait solitaire, recevant un coup de grâce de son amour déchu.

Il s’agissait d’un combat intérieur qui se livrait dans l’âme du personnage. Et la foule, qui de tout temps est indifférente envers les poètes, passait devant cet homme prosterné, sans se rendre compte que, tout en étant apparemment indemne, il venait de recevoir un coup, dont peut-être il ne se relèverait plus. Boléro fut représenté dans la nouvelle version de Lifar pour la première fois avec Istar. »

Serge Lifar rénovateur du ballet français par Jean Laurent et Julie Sazonova, Buchet/Chastel Corrêa, Paris, 1960 (pp. 133-134)