Endymion

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Première : le 27 juillet 1949 à l’Opéra de Paris

Musique : Jacques Leguerney

Argument (ou livret) : André Doderet

Décors et costumes : Dimitri Bouchène

Direction musicale : Robert Blot

Principaux interprètes : Lycette Darsonval (Diane), Nicolas Efimoff (le vieux Bûcheron), Michel Renault (Endymion)

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« Endymion » de Serge Lifar à l’Opéra

« […] C’est un Endymion de M. Doderet, que Serge Lifar a vêtu d’une fort belle et adroite chorégraphie. Les mythologues anciens sont assez sobres sur la légende d’Endymion et ils se bornent, peu s’en faut, à nous dire qu’il fut aimé de Séléné (c’est-à-dire la Lune) et au point, précise Pausanias, que, selon quelques auteurs, elle lui donna cinquante filles. En tout cas, son nom et celui de son père sont liés à la fondation d’Elis et sa stature d’ivoire s’élevait dans le sanctuaire, voisin, d’Olympie. Selon M. Doderet, ce jeu berger ou chasseur, et qui était fort beau, craignant de devenir pareil au vieux bûcheron de la forêt, demanda à Zeus de garder sa jeunesse éternellement ; il est exaucé, mais il a l’audace de « lever les yeux » sur Héra, femme de Zeus, et le dieu le condamne, non à vieillir, mais à dormir sans fin. Sur quoi, Artémis (après tout c’est aussi une divinité lunaire), qui est éprise de lui (secrètement, nous dit-on, car sa réputation est, comme on sait, d’être chaste) vole à son secours et, ne pouvant obtenir sa grâce, l’enlève au ciel. J’ajoute, par souci de précision, que pour Apollodore, c’est après avoir reçu l’amour de Séléné que Zeus lui demande de choisir une faveur : il prie le dieu qu’il le fasse dormir à jamais – toujours jeune. Il va de soi que toutes ces variantes sont parfaitement légitimes en un ballet.

Un rideau de scène – curieusement fait de deux draperies rouges déchirées, qui laissent apercevoir une partie du beau et sévère paysage et déjà entrevoir les acteurs – se lève et le jeune Endymion, jouant de sa flûte pastorale, danse au milieu des bêtes de la forêt. Sur quoi apparaît le vieux bûcheron (M. Efimoff), chargé de son faix – ce brave homme à qui Endymion ne veut pas ressembler. Cette partie préparatoire, assez longue, est tout emplie par les variations charmantes de M. Michel Renault, dont la souplesse, la grâce nerveuse et le fin métier font merveille à leur habitude. Quant à Zeus et à sa divine épouse, ils sont figurés de dos par des étoffes, l’une bleue, l’autre rouge, en forme sommairement humaine, juchées sur des sortes de colonnes fort rudes ; le parti pris est curieux et, au surplus, le talent original et délicieux de M. Bouchène […] nous est assez connu.

Un éclair, des jeux de lumière annoncent la catastrophe et le châtiment céleste. Des serviteurs de Zeus, portant un masque noir, étendent le jeune Endymion sur la pierre où il va dormir (belle berceuse à l’orchestre). Puis, dans le silence de la musique, c’est la radieuse entrée d’Artémis, entourée de ses compagnes en bleu léger – bleu de lin – ou lie de vin. Cette apparition a tous les caractères de l’entrée (frappante, harmonieuse) d’une grande étoile : aisance, sûreté, présence souveraine. C’est notre exquise Lycette Darsonval, vêtue de blanc, lumineuse, souriante. Et sa longue danse – soit seule ou avec le berger réveillé, qu’elle a contemplé amoureusement – est marquée de son talent mélodieux, aérien, sans défaut, enchanteur. Et comme elle tourne bien ! C’est magnifique. Et de quelle façon – couple admirable – Renault ne lui donne-t-il pas la réplique ! Le dénouement, après un nouveau coup de tonnerre, est rapide et preste : la déesse entraîne son amoureux déifié.

La chorégraphie de Serge Lifar, dont je n’ai pas le loisir d’examiner les détails, est remarquable et satisfait for le technicien. Son succès est d’autant plus notable que la partie n’était pas fort aisée. Le livret et la partition, un peu longs, et le manque d’aspérités si je puis dire, où s’accrocher, soit dans le sujet ou dans la musique, exigeaient de lui une rare habileté ; il s’en est tiré à son ordinaire, par les inépuisables ressources de sa science technique.

La partition est d’un musicien que je ne connaissais pas, je l’avoue ; elle est agréable, claire, bien sonnante et solidement écrite ; M. Leguerney, interprété par Robert Blot, a donc cueilli des applaudissements.»

Maurice Brillant, L’Aube, 29 juillet 1949, p. 2