Blanche-Neige

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Ballet en 3 actes et 6 tableaux

Première : le 14 novembre 1951 à l’Opéra de Paris

Musique : Maurice Yvain

Argument (ou livret) : d’après un conte des frères Grimm

Décors et costumes : Dimitri Bouchène

Direction musicale : Louis Fourestier

Principaux interprètes : Jean-Paul Andréani (le Prince charmant), Xavier Andréani (le Vallet de la reine), Claude Bessy (la Libellule), Max Bozzoni (l’Homme de la Forêt), Josette Clavier (la Luciole), Liane Daydé (Blanche-Neige), Serge Lifar (le Chasseur), Jacqueline Rayet (la Fée), Nina Vyroubova (la Reine)

Pierre Auburtin, Raoul Bari, Michel Descombey, Roland Duflot, Nicolas Effimoff, Raymond Franchetti, Romand (les Nains)

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« Blanche-Neige fut présenté le 14 novembre 1951, réglé sur la musique de Maurice Yvain et un livret tiré du conte populaire des frères Grimm. Ce thème utilisé au XIXe siècle par Nicolas Rimsky-Korsakov pour le célèbre Opéra russe ; puis au XXe, par Alexandre Gretchaninov qui composa une musique de scène pour le Théâtre Artistique de Moscou. Ce conte servit aussi d’argument à des féeries. Mais il n’avait jamais encore été traité chorégraphiquement. Liane Daydé, à peine sortie de l’école, était bien à sa place dans ce rôle. Nina Vyroubova fut la méchante Reine ; Serge Lifar : le Chasseur ; Andréani : le Prince, et Max Bozzoni : l’Homme de la forêt. Nicolas Efimoff était le chef des nains et Claude Bessy apparaissait en libellule.

Le livret suivait fidèlement le conte. Le premier tableau débutait par la scène du miroir de la Reine qui donnait l’ordre de tuer Blanche-Neige dans la forêt ; suivait l’épisode du Chasseur qui, ému de la gentillesse de la jeune fille, tuait un faon dont il apportait le cœur à la méchante Reine, tandis que Blanche-Neige découvrait la cabane des nains et s’y installait. Le deuxième tableau représentait le retour des nains, l’effroi de Blanche-Neige, puis leur amitié et les trois tentatives de meurtre ourdies par la Reine. Les deux premières, l’empoisonnement par le peigne et l’étranglement, furent empêchées par les nains revenus à temps pour sauver Blanche-Neige. Mais, la troisième fois, ils ne pouvaient plus que la pleurer, la Reine ayant offert à Blanche-Neige trop confiante une pomme empoisonnée. L’apparition du Prince qui décidait de faire des funérailles magnifiques à une si belle jeune fille, et l’intervention de la Fée qui lui rendait la vie, terminaient heureusement l’histoire, mais laissaient les nains abandonnés dans l’affliction. Le dernier tableau, où le pardon de Blanche-Neige arrêtait la vengeance des nains contre la Reine et le Chasseur, se terminait par les fêtes du mariage comme dans La Belle au Bois Dormant, au sujet assez voisin.

Ce thème simple et précis était réglé avec un souci de poésie naïve, sans recours à la magnificence des mises en scène de Marius Petipa et de ses élèves. Liane Daydé ressemblait plus à une touchante paysanne déguisée en princesse par l’imagination populaire, qu’à une des poupées de luxe des grands ballets-féeries. Et le Prince était charmant parce que jeune, beau, et qu’il dansait bien : il était tel que les poètes folkloriques se représentaient les princes, simple et gentil. La mise en scène s’apparentait aux enluminures des temps anciens, sans faste ni lourdeur superflus. C’était vraiment l’histoire touchante d’une pauvre petite fille tourmentée à mort par une méchante marâtre, sauvée par les bons forestiers, et trouvant un joli garçon qui, touché par sa bonté et sa gentillesse, voulait l’épouser. Quant aux « prince et princesse », il faut dire que dans les villages russes la nouvelle mariée est toujours appelée princesse et son époux prince, puisque à l’église on leur pose des couronnes dorées sur la tête. Blanche-Neige était donc princesse pour les humbles et les bons, et c’est ainsi que les spectateurs l’ont aimée.

Ce ballet donna à Lifar l’occasion de se montrer non dans le rôle du prince charmant, noble et amoureux, mais dans celui d’un serviteur, instrument de la reine, et qui pourtant, dans une scène remarquablement jouée, se sent touché par la bonté et évite le crime. La chasse et la marche dans la forêt lui fournissaient l’occasion d’accomplir des prouesses de virtuosité. Quant à Nina Vyroubova, elle donnait à la reine une froideur aiguë et une beauté glacée qui contrastaient avec la candeur enfantine de Blanche-Neige.

Ce ballet malgré son grand succès ne fut pas retenu au répertoire par Lifar qui tient plus à montrer des œuvres nouvelles qu’à reprendre ses créations anciennes. Les décors et costumes de Dimitri Bouchène ajoutaient à cette féerie une note poétique qui transformait ce ballet en véritable enchantement. »

Serge Lifar rénovateur du ballet français par Jean Laurent et Julie Sazonova, Buchet/Chastel Corrêa, Paris, 1960 (pp. 181-182)